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04 05 2025

Qui se cache derrière Wonder woman et Batman ?

Suite à notre dernière lettre où nous avons abordé le monde de l’adolescent, nous allons aujourd’hui nous intéresser à celui de l’enfant. Par quelle force est-il animé ? Qu’est-ce qui se passe en lui lorsqu’il brave l’autorité de l’adulte par des multiples bêtises ou quand il le provoque en disant par exemple des mots comme bite-nichons-cul ?

La psychanalyse corporelle nous a permis de découvrir que notre comportement découle de quatre moments clés que nous avons appelé traumatisme : le traumatisme fondateur à la naissance et les traumatismes secondaires, à la petite enfance, l’enfance et l’adolescence. 

Après avoir pris une place dans sa famille, trouvé une sécurité dans un foyer, l’enfant va ressentir un ébranlement lorsqu’il va se confronter au monde extérieur, souvent à la période où il va aller à la « grande » école. Tout est différent là-bas, je dois bien répondre à la maîtresse pour me sentir valorisé, je me sens aimé quand je donne mon goûter à un autre, autrement, non. De toutes nouvelles règles sont en jeu pour se sentir aimé. Perdu, il va être à la recherche d’une figure réconfortante pour retrouver une stabilité intérieure. Et celle-ci est incarnée généralement par le papa ou la personne qui représente l’autorité dans la famille car elle détient la solution ! Tout son être va alors se tourner vers cette personne rassurante et voudra lui ressembler pour pouvoir comme elle, se sentir à l’aise dans le monde. Tout faire comme papa par amour, capter son regard à tout prix pour se rapprocher de lui, devient la raison de vivre de l’enfant. Seulement, papa a des problèmes, des soucis et ce n’est pas si facile de retenir son intérêt, que puis-je faire pour qu’il tourne ses yeux vers moi ? L’enfant va se rendre compte que tout particulièrement les sujets reliés au sexe attirent immédiatement son attention. Cette découverte le rend super puissant, aussi fort que Wonder woman pour les filles ou Batman pour les garçons ! Il va en user pour arriver à ses fins, jusqu’au jour où l’adulte en face de lui va ressentir une grande gêne et rejettera l’enfant, tellement cette honte qui le submerge est insupportable ! L’enfant malmené va éprouver un nouveau sentiment, celui d’être sale – dégoûtant et comprendre qu’il y a des choses dans l’amour que l’on peut faire et que l’on ne peut pas faire.

Comment ce traumatisme influence notre comportement dans la vie quotidienne ?

Il va évidemment teinter tous nos plaisirs : tout d’abord le plaisir charnel où la honte pourra freiner la sensualité. La peur d’être perçu comme dégoûtant va limiter les élans purs et créer une distance avec son partenaire, plus jamais me laisser aller, je ne veux pas revivre cette honte, je ne veux plus être rejeté, je m’autorise à me laisser aller jusqu’à telle limite !

Le plaisir dans la manière de dépenser de l’argent : soit j’étouffe mon désir d’acheter cette belle robe qui me fait envie avec une phrase du genre, est-ce bien nécessaire ? Soit je me laisse tenter, j’achète la robe convoitée pour me retrouver à la fin du mois avec un compte en banque plus que vide !

Le plaisir par rapport aux obligations quotidiennes, en mettant toujours en avant les choses à faire, les responsabilités à honorer plutôt que de m’accorder un temps pour moi. Ou à l’inverse, je m’occupe de ce qu’il me plaît et en arrive à me faire réprimander d’une manière ou d’une autre de n’avoir pas honoré mes responsabilités. 

Ce traumatisme va teinter aussi mon comportement par rapport au pouvoir, je vais freiner ma puissance et souffrir de ne pas occuper ma place ou au contraire je vais la prendre totalement et il me sera reproché d’être un tyran ou une personne égoïste.

Prenons le cas de Luc, la trentaine, demandeur d’emploi depuis deux années. Il s’est fait licencier suite à la restructuration de son entreprise et s’est retrouvé au chômage comme la plupart de ces collègues. Après s’être remis du choc de cet événement, ayant une indemnité de rupture intéressante, Luc se met avec un certain entrain à la recherche d’un nouveau job. Ayant de bonnes compétences et travaillant dans le domaine de l’informatique, il ne devrait pas tarder à trouver un emploi qui lui convienne. Et pourtant, il a beau envoyé des CV, des lettres de motivation, il n’arrive même pas à décrocher un entretien d’embauche. Alors que tous ces collègues ont repris le travail, il reste sur la touche. 

Que se passe-t-il dans les coulisses de sa personnalité ? Eh bien se rejoue l’histoire d’un petit garçon qui aimerait tant exister aux yeux de son papa et quoiqu’il entreprenne pour attirer son attention, des bêtises à la provocation ou encore d’excellentes notes à l’école, son papa ne le voit pas, obnubilé par une maîtresse et heureux de pouvoir partager ses soucis d’homme avec son autre fils beaucoup plus âgé que Luc et avec qui il vit une belle complicité « entre hommes ». Désespéré, Luc se tournera vers un ami de son papa qui, subjugué par la demande d’amour de cet enfant, le rejettera pour finir, gêné du désir qu’il soulèvera en lui. 

Maintenant, Luc est persuadé qu’il ne peut intéresser personne sans se mettre en danger. Il ne se doute pas qu’il met tout en œuvre pour mettre en échec sa recherche d’emploi pour se conformer à cette veille histoire. C’est en retrouvant ce mécanisme inconscient, lorsqu’il a revécu ce troisième traumatisme, qu’il a pu pas à pas, reconquérir la confiance qu’il peut trouver un travail sans se mettre en danger et de débloquer cette situation. Il a pu se rendre compte qu’il s’adressait à des entreprises où sa candidature ne pouvait pas convenir. Il était comme le petit garçon à chercher à attirer le regard de son papa et à répéter sans cesse ce sentiment de ne pas exister, d’être un fantôme.

Dorénavant, libre de son histoire, il peut répondre avec justesse aux propositions du marché de l’emploi. 

Nous jugeons souvent nos décisions et nos comportements, nous aurions pu faire cela différemment, nous n’en faisons pas assez, bien fait pour toi t’avais qu’à pas faire ceci ! Nous sommes sans le savoir soumis à une décision traumatique prise dans le passé afin de moins sentir pour moins souffrir. Derrière les blocages de nos vies, nous n’imaginons pas ce qui se passe dans les coulisses, où un enfant terrorisé, demande juste une chose, d’être entendu dans sa douleur et pris dans nos bras. Cet accueil de nous-même est la condition incontournable pour pouvoir transformer nos vies.

Séverine Matteuzzi

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